Du bon usage des toilettes au Mali...
Il y a des choses qu'on ne dit pas comme ça
des secrets bien gardés,
révélés qu'une fois toutes les barrières tombées,
qu'une fois la confiance totalement accordée...
Des informations que vous ne trouverez dans aucun livre,
transmises uniquement de la bouche d'une génération
à l'oreille d'une autre
et dont le savoir permet de distinguer quelques rares initiés...
Il m'aura fallu durer 3 ans au Mali
pour que l'une d'elles,
un soir,
me soit confiée...
Que cette précieuse parole soit ici conservée.
alors voilà :
dans les toilettes en banco...
le trou n'est pas fait pour pisser,
c'est dans la gouttière qu'il faut le faire !
Blague à part, c'est bien ainsi que ça se pratique, et il m'aura fallu effectivement 2 ans et demi pour que je sache m'y prendre ! C'est qu'on ne m'avait pas tenu la main en arrivant pour m'expliquer la subtilité du fonctionnement des latrines, ni distribué de prospectus pédagogiques à la sortie de l'avion !
Et en faisant part autour de moi de ma récente découverte, je me rends compte qu'on est un paquet ainsi à baigner dans l'ignorance la plus totale !
Je pense ainsi aux réactions perplexes que doivent avoir les Maliens en
se trouvant confrontés à un bidet... Et je repense aussi à cette
réflexion rapportée par une amie, d'un Malien (évoquant les baignoires) trouvant très drôle de
trouver "des petites pirogues" dans les salles de bain d'occidentaux !
Bon.
Mais si je vous raconte ça, c'est surtout que le mauvais usage des toilettes au Mali n'est pas sans poser problème...
Si dans tout le pays les latrines sont installées au niveau du sol, au dessus d'une fosse creusée, et que les conséquences d'une mauvaise répartition des excréments n'entraînent pas (que je sache) de gros soucis...
... Il en est tout autrement à Djenné !
L'organisation spatiale des habitations y est très spécifique* : un petit couloir à l'entrée, sorte de sas où les vieux passent la journée à prendre le frais ou les artisans à travailler, une cour intérieure autour de laquelle se trouvent les pièces et un étage où se trouvent notamment.... les toilettes !
Elles sont ainsi construites dans un espace en retrait par rapport à la façade, au-dessus d'une colonne (de terre crue évidement) servant de fosse septique et construite sur toute la hauteur du bâtiment.
On trouve également une petite sortie, dans un coin de la pièce, reliée à une gouttière (voir la photo ci-dessous) censée évacuer les liquides...
Un trou est percé à mi-hauteur de la colonne septique (on le voit sur la photo) afin de permettre le dégagement des gaz.
Selon ce rapport de mission sur l'assainissement de Djenné, l'origine de ce type de toilettes - appelé njege - en serait le manque d'espace et à la hauteur très élevée de la nappe phréatique.
Au final, les urines sont donc évacuées dans la rue (si de gros efforts sont en cours concernant l'assainissement de Djenné, il reste du pain sur la planche !)... les excréments quant à eux remplissent la fosse qui est vidangée régulièrement.
Le fonctionnement de ce type de latrines est donc basé sur la séparation urine-fèces ! Faute de quoi, l'excédent d'eau dans la colonne s'infiltre dans les parois de terre, les fragilise....
... et j'aime autant vous dire que le spectacle de l'effondrement d'une colonne ne doit pas être beau à voir !
* à ce propos : petit coup de pub si vous êtes de passage à Djenné...
Je vous encourage à aller loger au Kita Kourou chez Amadou Diakité.
Si les chambres sont un peu glauques et le confort un peu rudimentaire pour qui veut impérativement la clim'... vous logerez en tout cas dans une vraie maison de Djenné, à l'architecture bien typique, et à Djenné ce n'est pas rien !
Vous pourrez également vous régaler de la cuisine et de la gentillesse d'Amadou !
C'est à deux pas de la mosquée, dans la petite place derrière. En face de la banque BIM (bel exemple de scandale architectural : de la terre cuite non crépie sur la place de la mosquée ! Rognutudju !).
Tel : 618 18 11 (il faut ajouter un 6 ou un 7 au début...)